Le Luxembourg occupe la 29e place parmi 41 pays riches
Le Rapport « Equité entre les enfants » présente une vue d’ensemble des inégalités de bien-être entre les enfants de 41 pays de l’Union européenne (UE) et de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Il se concentre sur les « inégalités dans la partie inférieure de la distribution », c’est-à-dire l’écart entre les enfants du bas et ceux du milieu de la distribution, et cherche à savoir jusqu’où la société laisse le fossé se creuser entre les enfants en matière de revenus, d’éducation, de santé et de satisfaction dans la vie.
Des tendances globales décevantes
Alors que de nombreux débats politiques se focalisent sur les revenus croissants du premier pour cent de la distribution, dans beaucoup de pays riches les revenus inférieurs à la médiane augmentent plus lentement que les revenus des ménages qui lui sont supérieurs. Dans toute l’OCDE, la tendance a évolué depuis les années 1980 : ce sont désormais les jeunes, et non plus les personnes âgées, qui risquent le plus de tomber dans la pauvreté.
Des évolutions accentuent la nécessité de surveiller de plus près le bien-être des enfants les plus défavorisés.
Les tableaux de classement du rapport « Equité entre les enfants » classent les pays en fonction de l’ampleur du fossé qui se creuse entre les enfants du bas de la distribution et les autres en termes de revenus, d’éducation, de santé et de satisfaction dans la vie. Le rapport offre également un aperçu de l’évolution des différents domaines dans le temps, ainsi qu’une analyse de l’influence du statut socioéconomique sur les inégalités constatées.
TABLEAU 1 – Inégalités de revenus
Les écarts de revenus ont augmenté dans la majorité des pays riches depuis la crise économique et ceci dans 19 de 37 pays. Ce développement concerne particulièrement les pays du sud de l’Europe, où les enfants les plus pauvres ont vu une baisse de leurs revenus par rapport aux revenus médians, qui eux-mêmes sont également en baisse.
La situation au Luxembourg
- Le Luxembourg se trouve à la 9e place d’un total de 41 pays, avec un écart de revenu relatif de 41,21%. C’est- à-dire que le revenu du ménage d’un enfant appartenant aux derniers 10% est de 41,21% plus faible que celui d’un enfant situé au milieu de l’échelle de distribution des revenus (la médiane). Ce chiffre tient compte des prestations sociales, sans lesquelles, l’écart serait de 61,3%.
- Le taux de pauvreté parmi les enfants au Luxembourg est de 13%, si mesuré en pourcentage d’enfants vivant dans des ménages dont les revenus s’élèvent à moins de 50% du revenu médian. Or, l’indicateur européen mesure la pauvreté des enfants comme la proportion d’enfants qui vivent dans un ménage dont le revenu est inférieur à 60% du revenu médian (*1). Selon cet indicateur, 25% des enfants (< de 18 ans) vivent en pauvreté au Luxembourg.
- Le taux de pauvreté des enfants (25%) est supérieur au taux de pauvreté des adultes (16%).
- Le Luxembourg a le revenu médian le plus élevé de l’UE.
Les données concernent les enfants âgés de 0 à 17 ans.
(*1): Revenu augmenté des prestations sociales, après déduction des impôts, ajusté en fonction de la taille et de la composition de la famille.
TABLEAU 2 – Inégalités dans l’enseignement
Pour le domaine de l’éducation, l’étude se base sur les tests PISA, dans le but de montrer les retards des élèves en difficulté (les 10% les plus faibles) par rapport à l’élève moyen en lecture, en mathématiques et en sciences à l’âge de 15 ans.
Dans la majorité des pays étudiés, l’écart de réussite a diminué entre 2006 et 2012, à l’exception de la Finlande et de la Suède, auparavant perçues comme des exemples de réussite et d’équité en matière d’éducation.
La situation au Luxembourg
- Le Luxembourg se trouve à la 33e place sur un total de 37 pays, tout en ayant un pourcentage de 14,4 d’enfants sous le niveau de compétences 2 dans les trois matières.
- Le taux de 14,4% est resté constant entre les tests PISA de 2006 et de 2012.
Les données concernent les jeunes âgés de 15 ans.
TABLEAU 3 – Inégalités en matière de santé
Au niveau de la santé, l’étude compare l’écart relatif des problèmes de santé signalés par les enfants, ainsi que le pourcentage d’enfants signalant un ou plusieurs problèmes de santé chaque jour. Une échelle de 0 (fréquent) à 32 (jamais) a été utilisée pour signaler les occurrences de 8 problèmes de santé différents.
De façon générale, les inégalités se sont creusées dans 25 pays depuis 2002, dont considérablement en Irlande, à Malte, en Pologne et en Slovénie.
Dans les 34 pays examinés, la probabilité que les filles soient laissées pour compte en termes de santé sont nettement plus élevées.
Les écarts les moins importants au niveau de la santé ont été mesurés en Allemagne, en Autriche et en Suisse, tandis que les inégalités les plus grandes ont été trouvées en Turquie et en Israël.
La situation au Luxembourg
- Le Luxembourg se trouve à la 29e place d’un total de 35 pays, avec un score de santé de 30,27% inférieur pour les enfants de la partie inférieure de la distribution comparé à celui des enfants situés au milieu de la distribution.
- Près de 1 enfant sur 4 au Luxembourg signale avoir un ou plusieurs problèmes de santé tous les jours.
- Le Luxembourg figure parmi les pays où la santé des enfants du bas de la distribution s’est détériorée davantage par rapport à celle des enfants du milieu de la distribution, entre les années 2006 et 2014.
Les données concernent les jeunes âgés de 11, 13 et 15 ans. Australie : 13 à 14 ans.
TABLEAU 4 – Inégalités en matière de satisfaction dans la vie
Quant à la satisfaction dans la vie, le rapport examine les réponses d’enfants concernant leur niveau de satisfaction mesuré sur une échelle de 0 à 10. L’enfant « moyen » fait état d’un niveau de satisfaction dans la vie de 8 sur 10 dans presque tous les pays.
L’écart de satisfaction dans la vie a augmenté dans plus de la moitié des pays depuis 2002, en particulier en Belgique, en Espagne et en République tchèque. Or, les enfants du bas de la distribution se trouvent loin derrière leurs pairs – leur niveau de satisfaction étant généralement inférieur à la médiane de 2,5 à 3 points.
Dans la tranche d’âge de 13 à 15 ans, les filles indiquent moins de satisfaction dans la vie que les garçons.
La situation au Luxembourg
- Le Luxembourg se trouve à la 32e place sur un total de 35 pays, l’écart de satisfaction relatif étant de 30,04% entre les enfants les moins satisfaits et ceux qui représentent la moyenne.
- 8,2 % d’enfants indiquent que leur niveau de satisfaction est de 4 sur 10 ou moins.
- Entre 2006 et 2014, l’écart de satisfaction dans la vie entre les enfants les moins satisfaits et ceux qui représentaient la moyenne a augmenté de 2%.
Les données concernent les jeunes âgés de 11, 13 et 15 ans. Australie : 13 à 14 ans.
Les inégalités en matière de satisfaction et le statut socio-économique
Quant à la satisfaction de vie, le rapport souligne que de façon générale, les enfants issus de familles d’un statut socioéconomique bas ont plus de risques de se trouver en bas de l’échelle de satisfaction.
Se retrouvant à la 30e place d’un total de 34 pays, le Luxembourg figure parmi les pays où l’influence du statut socioéconomique sur la satisfaction est très forte. En effet, les enfants de la catégorie socioéconomique la plus élevée.
Conclusions
- Malgré le fait que le Luxembourg figure toujours parmi les premiers pays au monde quant au PIB par habitant et bien que le salaire médian soit le plus élevé de l’UE, le rapport constate une inégalité importante de bien-être entre les enfants du bas et ceux du milieu de la distribution.
- Au Luxembourg le statut socioéconomique demeure une variable explicative déterminante de l’état de santé, du niveau scolaire et du niveau de satisfaction d’un enfant à l’égard de sa vie.
- Les inégalités y résultant ont un impact sur tous les droits de l’enfant et empêchent les enfants très tôt à développer leur plein potentiel tout en restreignant leurs perspectives. Les expériences vécues par ces enfants n’ont donc non seulement un impact considérable sur leur vie actuelle, mais également sur les perspectives et possibilités qui s’offriront à eux à l’avenir. De même, les inégalités sociales et économiques rencontrées pendant l’enfance se traduisent par des risques accrus de revenus réduits, de mauvaise santé et d’un plus faible niveau de compétences à l’âge adulte, contribuant à perpétuer les inégalités d’une génération à l’autre.
- Or, plus d’égalité est possible. En témoignent les exemples de pays qui ont des écarts d’inégalité très faibles ou qui ont réussi à redresser leur taux d’inégalité grâce à des politiques favorables ciblant directement les familles et enfants en bas de la distribution.
- De façon générale, les pays qui affichent moins d’inégalités comptent moins d’enfants vivant dans la pauvreté, en grande difficulté scolaire ou signalant des problèmes de santé fréquents ou un niveau de satisfaction très faible.
- De plus, dans aucun des pays affichant de faibles écarts, le recul des inégalités n’a entraîné la baisse générale des domaines examinés, prouvant qu’un soutien accru aux enfants les plus défavorisés mène à l’amélioration globale du bien-être de TOUS les enfants!
Recommandations
UNICEF-Luxembourg recommande que des efforts soient entrepris notamment dans les domaines de l’éducation, de la santé, ainsi que de façon générale dans le recueil de données et du suivi du bien-être des enfants.
Education
Concentrer les efforts sur l’amélioration des résultats scolaires des élèves défavorisés et assurer que l’éducation puisse jouer un rôle d’ascenseur social pour briser le cercle vicieux de la pauvreté.
- En offrant accès à un soutien scolaire personnalisé, journalier et de qualité à l’école même, dans la maison relais ou dans le cadre d’écoles à plein temps afin de lutter contre les inégalités créées par le soutien fourni à la maison ou les cours de rattrapage payés.
- Assurer que les activités extracurriculaires organisées par les écoles (théâtre, excursions etc.) soient gratuites.
- Eviter que le manque de compétence dans une des langues officielles utilisées dans l’enseignement ne devienne un obstacle dans la réussite scolaire générale.
- UNICEF-Luxembourg est d’avis que les écoles et les maisons relais, qui jouent un rôle crucial dans la vie de chaque enfant, doivent devenir des lieux clés dans la lutte contre les inégalités et l’exclusion sociale.
Santé
Promouvoir et favoriser un mode de vie sain pour tous les enfants
- Assurer que chaque enfant ait accès à un repas complet de qualité gratuit par jour dans le cadre de l’école ou dans une maison relais.
- Programmes d’éducation à la santé dans l’enseignement fondamental et secondaire, voire même des cours de nutrition et des ateliers de cuisine.
- Favoriser la participation des enfants les plus démunis à des activités physiques par le biais d’activités sportives gratuites.
Recommandations générales
Amélioration des méthodes de recueil de données et du suivi du bien-être des enfants, en respect du principe de l’équité
- Introduction d’un plan d’action national holistique en faveur des enfants, basé sur le principe de l’équité. C’est-à-dire que toutes les politiques sociales promeuvent le progrès pour tous, tout en donnant une considération spéciale aux enfants les plus défavorisés. Ceci notamment pour éviter l’exclusion sociale et pour briser le cercle vicieux de pauvreté et du transfert des inégalités d’une génération à l’autre.
- Il est important que les politiques sociales soient à leur tour évaluées en amont et par après, afin d’assurer leur utilité et leur impact positif pour les enfants les plus défavorisés.
- Production de statistiques plus régulières, diverses et ventilées pour fournir une représentation plus exhaustive de la situation du bien-être des enfants.
- Intégrer les voix des enfants aux processus de recueil de données et encourager leur participation dans les débats concernant leurs droits et leur bien-être.
La médiane – de quoi s’agit-il?
La médiane est un nombre qui divise en 2 parties la population telle que chaque partie contient le même nombre de valeurs.
Dans le rapport, le taux de pauvreté parmi les enfants est mesuré en pourcentage d’enfants vivant dans des ménages dont les revenus s’élèvent à moins de 50% du revenu médian. Selon cette méthode de calcul 13% d’enfants en-dessous de 18 ans vivent en pauvreté au Luxembourg.
Or, l’indicateur européen mesure la pauvreté des enfants comme la proportion d’enfants vivant dans un ménage dont le revenu est inférieur à 60% du revenu médian. Selon cet indicateur, 25% des enfants (> de 18 ans) vivent en pauvreté au Luxembourg.
L’équité – De quoi s’agit-il ?
Le principe de l’équité implique que les politiques sociales promeuvent le progrès pour tous, tout en donnant une considération spéciale aux enfants les plus défavorisés.
Sources des données
- Tableau 1 – Les calculs du tableau de classement 1 reposent sur les microdonnées des Statistiques de l’Union européenne sur le revenu et les conditions de vie (EU-SILC) 2013 pour les pays de l’Union européenne et l’Islande, la Norvège et la Suisse.
- Tableau 2 – Les calculs du tableau de classement 2 reposent sur le Programme international pour le suivi des acquis des élèves de l’OCDE (PISA) 2012.
- Tableau 3 & 4 – Les calculs des tableaux de classement 3 et 4 reposent sur l’enquête sur les comportements liés à la santé des enfants en âge scolaire (HBSC) 2013/2014.